L'Église "Notre Dame"
La date précise de la construction de l'Eglise de Notre-Dame de La Peyratte n'est pas déterminée mais se situe certainement au début du XIIème siècle, vers 1100. D'après un document relatant en 1140 "la remise publique d'une dette dans l'église, en présence du prieur Aimeri Moreau", on peut penser que l'église était bien achevée. Elle est l'œuvre des moines de Talmont qui sont venus établir un prieuré à La Peyratte aux environs de 1070. Certains documents avancent la date de 1039, date à laquelle le comte Guillaume de Parthenay qui tenait la terre de La Peyratte de ses ancêtres, la donna à l'abbaye de Saint Jean d'Angely qui la donna au seigneur de Kadelon, seigneur de Talmont, qui lui-même la donna à l'abbaye de Talmont lors de son mariage avec Ameline, la fille de Guillaume. Les biens comprenaient la terre de La Peyratte, une chapelle, une fontaine et le droit de pêche dans le Thouet et les étangs.
L'Eglise de Notre-Dame retient l'attention par son caractère d'authenticité marqué par la rigueur et la sobriété. Austère, elle est typique du pur art roman gâtinais. C'est une des rares églises à avoir traversé neuf siècles sans trop de dommages. Elle a été classée monument historique en 1913.
C'est une église prieurale qui comportait des stalles de bois très sobres, une dizaine de chaque côté du chœur, séparées du reste de l'église par des grilles de fer sculptées, comme les bancs à droite de la porte d'entrée. Ces grilles ainsi que les bancs auraient été fabriqués à la fin du XVIIème ou au début du XVIIIème siècle, à la forge à fer de La Peyratte. Les stalles, les grilles, la chaire ainsi que les grilles servant de table de communion en bas du grand autel ont été enlevées en 1974 lors du nettoyage de l'église. il en fut de même pour l'autel consacré à Sainte Radegonde qui avait été inauguré en 1857. Une tribune existait également au fond de l'église.
Au début de sa construction, c'est un long rectangle massif de 35 x 6 m avec trois contreforts collés sur chaque face qui lui confère un aspect fortifié: une seule nef orientée Est-Ouest (la lumière vient d'Orient, terre de naissance du Christ), trois étroites fenêtres telles des meurtrières sur la façade sud et une seule du côté Nord (il faut réduire le froid).
Les deux chapelles latérales qui forment le transept sont de construction postérieure à la nef. Celle du Sud, de style gothique, date du XVIIème siècle; elle est dédiée à la Vierge. Sur son autel en granit, dans la niche, trône une très belle statue en bois de la Vierge tenant l'enfant Jésus. La chapelle du Nord est de construction encore plus postérieure, probablement au XIXème siècle quand l'agrandissement de l'église a été décidé. Elle abrite un autel en bois doré et dans la niche se trouve une statue de Saint-Roch accompagné de son chien. Dans une châsse repose les reliques du Saint qui étaient portées chaque année en pèlerinage jusqu'à une statue de Saint-Roch située à la croisée du chemin de Moulin Neuf sur le chemin de Puyrajoux. Ce pèlerinage qui attirait des foules nombreuses au siècle dernier avait lieu chaque année, le dimanche suivant le 15 Août. Il a cessé aux environs de1960.
L'abside ou chevet de l'église est plat, orné de vitraux offerts par des familles de communiants en 1924 et 1933 (les dates sont inscrites dans les vitraux). De chaque côté de l'autel, deux niches sont creusées dans la pierre; celle de droite contient le tabernacle, l'autre à gauche, témoigne de la présence divine par la lampe rouge allumée. A gauche du transept, une petite porte était la porte d'entrée des moines venant de leur prieuré. Au sol, des inscriptions sur des dalles révèlent les noms de personnages importants enterrés là. En 1852 (ou 1853), le cimetière a été transféré à une centaine de mètres; à cette occasion, une vingtaine de dalles ont servi à repaver l'église venant compléter la trentaine de dalles déjà en place depuis de nombreuses années.
A l'extérieur, les deux portails sont à voussures et berceaux brisés. Celui du fond, à l'Ouest, s'ouvre sur une façade classique bien romane, surmontée d'un pignon triangulaire souligné d'une corniche. Le portail Sud (sur la place) est à berceau brisé à deux rouleaux sur colonnettes de chapiteaux décorés de feuillages; il a été longtemps précédé d'un rustique "ballet" (sorte de préau) qui fut démoli en 1920. Une bretèche au-dessus du portail Sud ainsi qu'au-dessus de la porte des moines, à l'extérieur, renforce l'idée d'une église fortifiée.
Le clocher est presque plat et presque carré (6x7x17 m). Il est situé à la croisée du transept sur la dernière travée. Jadis, les grosses cordes pendaient là, derrière la chaire, en attendant d'être tirées par le sacristain ou les enfants ravis d'être soulevés et emportés par le balancement des cloches. La sonnerie est maintenant électrifiée et l'angélus retentit trois fois par jour. Conçu pour recevoir quatre cloches, le clocher n'en abrite que trois actuellement. A l'extérieur, des faisceaux de colonnettes allègent l'aspect trapu du clocher et dans chaque compartiment s'ouvre une fenêtre en plein cintre. Au dessous de la toiture du corps de l'église et sur les quatre faces du clocher, des "corbeaux" sculptés soutiennent les blocs de pierre rectangulaires. Il représentaient des visages, des formes plus ou moins grimaçantes, des têtes d'animaux sauvages, tous issus dit-on de l'humour instantané des sculpteurs qui s'inspiraient soit des habitants soit des compagnons bâtisseurs. C'était à l'époque une des rares façons de pouvoir représenter la vie du village et de ses habitants. A l'intérieur de l'église, les tableaux représentant les quatorze stations du Chemin de Croix sont des peintures à l'huile installées en 1854 mais leur auteur est resté inconnu.
Le retable à ailes
Le superbe retable à ailes du maître autel, adossé au mur du chevet, mérite attention. L' œuvre classée en 1979 a été restaurée en 1990-1991 par un maître ébéniste, restaurateur d'objet d'art. La beauté de ce tabernacle doré a été relaté dès 1695 lors d'une visite de l'archiprêtre dans la paroisse. Son origine date, semble-t-il, du début du XVIIème siècle et sa destination probable était la chapelle des Capucins de Saint-Martin de Ré mais son auteur, le sculpteur parthenaisien Claude Laumosnier, en a jamais fait la livraison. Comment est-il arrivé dans l'église du prieuré? Provenait-il du monastère des Capucins de Parthenay édifié entre 1620 et 1642 ? Serait-il arrivé à La Peyratte, grâce à la générosité de Charles de la Porte, seigneur de la Meilleraye et propriétaire de la forge à fer?
Le meuble est large de 4x3 m de hauteur, en bois de chêne et de noyer, peint et doré. Le premier gradin est orné de rinceaux (enroulements) de feuillage et de fleurs, interrompus au centre par un motif ovale enfermant un miroir. Le deuxième gradin est en retrait, approfondi au centre pour servir de support au tabernacle. Le décor alterne bouquets et rinceaux de feuillages. Le corps du tabernacle semi-circulaire et les ailes droites sont de même hauteur. Le décor des colonnes est fait de branches de chênes entrecroisées au feuillage stylisé, accompagné de grappes de fruits, de palmes nouées en croix par un ruban. Une corbeille de fleurs est posée sous la porte du tabernacle. Sous chaque colonne, il y a une fleur ou une palme. Le fût des colonnes est revêtu de pampres et surmonté d'un chapiteau corinthien.
Le dais d'exposition mesure 1,80m de hauteur. A son sommet, le dôme est couronné d'un globe surmonté d'une croix. Il est soutenu par quatre colonnes torses, habillées de feuilles de laurier. Le décor du fond du dais est constitué de deux bras, l'un nu, l'autre habillé. Ils sont entrecroisés et surmontés d'une croix. Les deux mains portent des stigmates. Il s'agit là, de l'emblème héraldique des couvents franciscains: le Christ et Saint François. Chacune des ailes porte un cartouche reliquaire; à gauche, les reliques de Saint Bénigne et Venturinus; à droite, celles de Sainte Candide.
Entre les colonnes , les cinq panneaux portent aux angles des feuilles d'acanthe et des branches de chêne nouées avec des rubans. De gauche à droite :
"La Naissance de Notre-Seigneur", sous le regard de deux angelots dont l'un tient une banderole portant l'inscription "Gloria in excelsis". La Vierge présente son divin enfant à trois bergers; deux ont posé leur chapeau et leur bâton à terre et sont agenouillés; le troisième, curieusement, enlace la tête du bœuf. Témoins de la scène, un enfant est présent au côté de Joseph qui rend grâce au ciel en levant les yeux.
"La Visitation de la Vierge à Sainte Elisabeth"; les deux femmes chaussées de sandales s'enlacent tandis que Joseph, la main droite appuyée sur un bâton, porte la gauche à son chapeau. Un chien, étonné, assiste à la rencontre.
sur l'aile droite, "l'Adoration des Mages"; Joseph est derrière la Vierge debout tenant Jésus dans ses bras. L'un des trois mages s'apprête à offrir son coffret d'or alors que les autres mages, à genoux, ont posé leur couronne sur le sol pour présenter une coupe d'encens et un vase de myrrhe. L'étoile qui leur a servi de guide brille au firmament, à droite de la scène.
La porte du tabernacle représente un "Sauveur, le Christ et les pèlerins d'Emmaüs"; la dernière scène se déroule devant une auberge à l'enseigne du croissant dont la croisée est minutieusement représentée avec à l'arrière-plan, une colonne et les remparts de la ville. Le Christ est le seul des trois personnages à ne pas porter de sandales. Il bénit une miche de pain qu'il saisit de l'autre main, au grand étonnement de ses compagnons.
Sur le côté droit du tabernacle, "le Mariage de la Vierge"; on y voit une colombe qui voltige dans les nuages. Joseph tient à la main une baguette fleurie. La Vierge y est représentée, jeune et soumise. Un grand prêtre juif est bizarrement costumé en évêque.
La porte du tabernacle est à plancher tournant, c'est-à-dire qu'on peut le faire pivoter à l'intérieur même du meuble comme dans un tour, son revers ayant la forme d'une niche; le tabernacle peut alors servir à l'exposition d'un ostensoir.
Enfin, à gauche de l'autel, une statue en bois, formée de trois tronçons sculptés et emboîtés représente un moine franciscain : Saint-Félix.